
Partition suspendue pour piano (fantôme), violoncelle et bande.
Étagères de stockage, caisson lumineux, microscope, roches de Jérusalem, lames minces, cartes postales rehaussées, t-shirts, mugs, cartes plables, artefacts divers. Dimensions variables.
La figure oasienne est, par excellence, celle de la possession d’un capitalisme sorcier. Elle désigne ce lieu de quiétude artificielle, ce refuge fantasmé, qui tranche radicalement avec l’environnement quotidien. Elle prend la forme de l’étal, du magasin, du stand-souvenir, de cet espace saturé d’objets à acheter pour étancher une soif : soif de signes, de récits, de reconnaissance. Dans ce décor de répit, chaque artefact se donne comme totem : souvenirs, vêtements, porte-clés, logotypés, emblème d’une lignée avec laquelle on voudrait faire corps. Mais ces totems ne sont branchés sur rien. Sinon sur l’incommensurable vacuité des signes consuméristes. Orientaliste, colonialiste, paternaliste, la figure oasienne est le lieu et le moment où l’on croit pouvoir se rasséréner dans un espace de signes bienveillants, reconnaissables par toutes et tous à force d’« ensignement » par d’impérieuses redondances. Mais, nous le savons aussi, ce refuge est un mirage. Ces signes sont vides. Ils n’ont ni charge, ni lien, ni écho. Ils ne disent ni l’indicible ni l’ineffable. Ils ne creusent rien. Ce sont des sédiments de surface, purs effets, pure image, qui relèvent de ce que l’on pourrait appeler la dysneylandisation globalisée du monde : une accumulation d’expériences prêtes à consommer, de récits désactivés, de gestes neutralisés.


La partition pour violoncelle est une transcription à l'échelle des frontières réelles, imaginées, des murs et des checkpoints en cours sur le territoire de la Palestine et d'Israël. Les données géopolitiques deviennent le contrepoint de l'analyse cristalline de la "terre sainte", transposé en structure harmonique et joué par un piano fantôme. La partition pour piano est seulement visible au microscope, gravée sur trois lames minces correspondant aux trois parties de la pièce.
"Lost in the silent Oasis" est l'anagramme d'un fragment de requiem : "Lacrimosa Dies Illa" (ces jours de larmes).

Sur les étals de cette installation, se rencontrent dans une déstabilisation constructive, des analyses minéralogiques réalisées de la « terre-sainte » convoquée comme témoin d’une histoire cosmopolitique complexe et des descriptions des partitions géopolitiques d’Israël et de la Palestine durant le vingtième siècle jusqu’à aujourd’hui.
Cette rencontre, ces branchements fautifs, ces bricolages décontractés, entre l’analyse scientifique (minéralogique et géographique) et la charge « magico-religieuse » (de la ville-monde et du partage d’Israël et de la Palestine) des « objets » analysés qui ouvrent pour le spectateur auditeur un espace d’ineffable. De peur que l’ensemble de notre Histoire conjointe tombe « dans la nuit de la mort ».
